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Project Motor Racing

today09/12/2025 26

Arrière-plan
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Depuis quelques années, le jeu de course vit une étrange schizophrénie : d’un côté, des simulations toujours plus pointues réservées aux passionnés capables d’ajuster un différentiel les yeux fermés ; de l’autre, des productions grand public qui misent davantage sur le spectacle que sur la précision. Entre ces deux mondes, rares sont les titres qui tentent réellement d’occuper l’espace intermédiaire sans perdre leur identité en route. C’est précisément là que se positionne Project Motor Racing, un jeu qui promet de concilier rigueur et accessibilité, sérieux et plaisir immédiat. Une ambition louable sur le papier… mais encore faut-il réussir à transformer l’essai une fois en piste.

Une arrivée discrète dans un genre saturé

Dans un marché où les jeux de course peinent de plus en plus à se démarquer, tant la concurrence est féroce et la ligne de démarcation entre simulation et approche grand public de plus en plus floue, Project Motor Racing arrive avec la prétention de représenter une alternative crédible aux mastodontes historiques du genre. Le titre mise sur une image sérieuse, presque austère, comme pour rappeler qu’il n’a pas été pensé pour flatter la rétine ou séduire par des artifices, mais pour convaincre par la rigueur de sa conduite et la richesse de son contenu. Très vite, pourtant, on se rend compte que cette approche minimaliste, qui aurait pu constituer sa personnalité, se révèle surtout symptomatique d’un manque d’âme. L’interface, tout comme la direction artistique, adopte une sobriété poussée à l’extrême, offrant une lisibilité indéniable mais un caractère globalement absent. Rien n’est franchement raté, mais rien n’habite vraiment l’expérience non plus : pas de vision esthétique, pas de parti pris, pas d’essai stylistique. Tout fonctionne, tout est propre, mais tout semble interchangeable, comme si Project Motor Racing avait été conçu avec un cahier des charges irréprochable plutôt qu’une véritable intention artistique.

Une conduite solide, mais sans véritable personnalité

C’est une impression qui s’étend rapidement au cœur du jeu : la conduite. À la prise en main, Project Motor Racing surprend plutôt positivement par son équilibre. Il ne cherche pas à punir le joueur comme peuvent le faire les simulations les plus pointues, mais ne tombe jamais dans l’excès d’assistance. Les sensations de poids, de transfert de masse et de freinage sont plutôt bien rendues, suffisamment en tout cas pour que l’on sente une différence nette entre les catégories de véhicules. Sur volant, l’expérience est encore plus convaincante : le retour de force transmet correctement les pertes d’adhérence, le grip progressif en sortie de virage ou la nervosité d’un freinage tardif. Pourtant, malgré cette base solide, quelque chose manque constamment : du caractère. Les voitures semblent étrangement sages, uniformisées, lissées. Les moteurs grondent mais ne vibrent jamais vraiment, les sorties de pistes manquent de brutalité, les reprises ne donnent jamais l’impression d’être au bord du contrôle. Tout fonctionne, mais rien ne marque. Là où les grandes simulations transforment chaque virage en micro-événement mécanique, Project Motor Racing offre un pilotage correct, agréable, mais rarement excitant. C’est une conduite qui se laisse pratiquer, pas une conduite qui s’impose ou qui s’imprime dans la mémoire.

Une IA hésitante, souvent trop prudente

Cette sensation de tiédeur se retrouve dans l’intelligence artificielle, qui oscille entre prudence excessive et décisions incompréhensibles. Sur la plupart des courses, l’IA se montre disciplinée, parfois trop : elle hésite beaucoup, freine tôt, manque d’agressivité dans les dépassements. En difficulté élevée, elle se contente d’aller plus vite sans modifier réellement son comportement, ce qui donne des pelotons très homogènes mais peu crédibles. Et parfois, sans prévenir, un pilote se met à freiner en pleine ligne droite, à rater complètement un virage ou à rester bloqué derrière un adversaire plus lent. L’ensemble n’est pas catastrophique, mais jamais réellement satisfaisant non plus. Là encore, la constante est la même : un fonctionnement globalement correct, mais qui manque cruellement d’identité comportementale. On ne ressent pas la moindre rivalité, pas le moindre enjeu, et l’on finit par considérer les autres voitures comme de simples obstacles plutôt que de véritables adversaires.

Du contenu dense, mais une profondeur limitée

Le contenu, paradoxalement, est l’un des points les plus fournis du jeu mais aussi l’un de ceux qui mettent le plus en lumière son problème fondamental. Sur le papier, Project Motor Racing propose une cinquantaine de circuits, une centaine de véhicules, un mode carrière complet, un multijoueur stable et un système de réglages avancé. Tout y est, mais les éléments manquent de profondeur, comme s’il s’agissait d’un empilement de fonctionnalités plutôt que d’un ensemble pensé de manière cohérente. Le mode carrière, par exemple, offre une progression classique, très structurée, mais sans réel souffle. Les épreuves se ressemblent, les objectifs ne renouvellent jamais la formule, et l’absence de narration ou d’événements dynamiques laisse une impression de routine rapide. Le multijoueur bénéficie d’une bonne stabilité technique, mais manque d’un écosystème profond : pas de vraie hiérarchie compétitive, peu d’événements spéciaux, et une communauté encore trop dispersée. Quant aux réglages, ils sont très complets mais distribués dans des menus d’une austérité telle que l’envie de tout optimiser s’érode rapidement. Le jeu donne beaucoup, mais inspire peu.

Une technique propre mais sans éclat

Techniquement, Project Motor Racing s’en sort avec les honneurs, mais on note là aussi un manque de finition. Les carrosseries sont convaincantes, les circuits bien modélisés, mais les environnements manquent de vie et les textures secondaires accusent parfois un retard d’une génération. Certaines zones de piste provoquent des chutes de framerate sur PC, malgré une optimisation correcte ailleurs. Le HDR affiche un contraste mal calibré, les ombres manquent de précision, et la météo dynamique, pourtant mise en avant, reste beaucoup trop timide. Le son moteur constitue l’un des points où les faiblesses sont les plus perceptibles : qu’on soit dans l’habitacle ou en vue extérieure, le mixage reste plat, peu enveloppant, presque clinique. Une fois encore, tout fonctionne… mais rien ne transporte.

Conclusion 

Au final, Project Motor Racing souffre beaucoup moins de défauts concrets que d’un manque persistant de personnalité. Dans un genre où chaque grand nom s’est forgé une identité claire l’élégance quasi-muséale de Gran Turismo, le spectacle accessible de Forza, la précision chirurgicale d’Assetto Corsa Competizione, ou l’exigence extrême d’Automobilista ce titre se trouve coincé dans une zone grise. Il n’a pas l’audace de s’affirmer comme une simulation pointue, mais il n’a pas non plus la générosité ou la mise en scène d’un jeu plus orienté grand public. Tout sonne juste, mais rien ne chante. C’est peut-être la pire situation pour un jeu de course : celui d’un titre dont on reconnaît les mérites, mais dont on ne se souvient presque plus une fois la console éteinte.

Écrit par: Warmelin

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